Historique du Prix Morny : le tremplin des 2ans

20 août 2021

Historique du Prix Morny : le tremplin des 2ans

Photo scoopdyga.com

Une des plus anciennes courses de France, créée dès la deuxième année du lancement de Deauville en 1865, c’est aussi le premier Groupe 1 de la saison pour les 2ans. Malgré cette situation, il a souvent révélé le champion de la fin de saison. Son nom rend hommage au Duc de Morny, demi-frère de Napoléon III qui créa Longchamp, le Grand Prix de Paris et les courses de Deauville !

Août, Deauville

Darley Prix Morny 

Finale des Darley Series

Groupe 1, 2 ans, 1 200 mètres, 350 000 €

Créé en 1865

Record de la course : 1’07’’90, Arcano (2009)

Tenant du titre : CAMPANELLE (f2, IRE par Kodiac et Janina, par Namid), appartenant à Stonestreet Stables, élevée par Tallyho Stud, entraînée par Wesley Ward et montée par Lanfranco Dettori.

La course se déroule en 2021 pour la 151ème fois.

L'édition 2020

Dimanche 23 août 2020, Deauville. - La participation des poulains de l’entraîneur américain Wesley Ward dans le Darley Prix Morny (Gr1) est toujours un coup de poker intéressant et la main qu’il détenait cette année avec Campanelle (Kodiac) était vraiment la plus forte. La pouliche, débarrassée des œillères qu’elle portait au meeting royal d’Ascot lorsqu’elle a remporté les Queen Mary Stakes (Gr2), a complètement surclassé la grande course française des 2 ans de l’été, bouclant ses 1 200 mètres en ligne droite avec deux longueurs d’avance sur l’anglais Nando Parrado (Kodiac). De deux longueurs.

C’est une troisième victoire dans la course pour Wesley Ward après No Nay Never (2013) et Lady Aurelia (2016).

Entraînée aux États-Unis, achetée 190 000 £ aux ventes de Newmarket, elle s’était imposée pour ses débuts en Floride, et avait confirmé dans les Queen Mary Stakes (Gr2) sur 1 000 mètres au meeting royal d’Ascot.

Cliquer ici pour obtenir les chronométrages partiels.

Historique

Le Prix Morny fut créé en 1865, dès la deuxième année des courses à Deauville, sous le nom de Prix de Morny (sur une distance de 1.000 mètres) en souvenir du duc de Morny, décédé en début d'année. Le premier vainqueur fut la pouliche Puebla II dont le propriétaire A. Desvignes fut crédité de 9.150 F. En 1871, la course prit le nom de Prix de Deux Ans mais redevint Prix Morny (sans de) en 1911. Il ne fut pas couru de 1914 à 1918 et en 1940. Il fut disputé à Longchamp en 1941 et 1942 (sur 1.000 mètres) et en 1944 (sur 1.300 mètres), à Maisons-Laffitte en 1943 et 1945. La distance fut de 1.200 mètres en 1866 et 1867, de 1.300 mètres en 1868 et 1869 puis fut portée à 1.400 mètres de 1870 à 1886. Depuis 1887 elle est de 1.200 mètres (sauf les trois exceptions mentionnées). Des surcharges, pouvant atteindre cinq kilos, furent en vigueur jusqu'en 1920.

Charles Auguste Louis Joseph Demorny, dit comte puis duc de Morny (1811-1865)

Comte puis duc en 1862, Auguste de Morny était le fils naturel du général de Flahaut et de la reine Hortense, ainsi le frère utérin du futur empereur Napoléon III. Après avoir servi comme sous-lieutenant en Algérie, il créa une importante et prospère usine pour la fabrication du sucre de betterave près de Clermont-Ferrand. Député du Puy-de-Dôme en 1842, ministre de l'Intérieur, il prit part à la réalisation du coup d'Etat du 2 décembre 1851 qui amena au pouvoir son demi-frère. En 1852, il devint membre du Corps législatif qu'il présida de 1854 jusqu'à sa mort survenue le 8 mars 1865. Il avait trois dadas : les œuvres d'art, le théâtre - il écrivit de pièces sous le nom de Saint-Rémy - et les chevaux.

Elu membre du Jockey Club en 1838, le comte de Morny fait courir pour la première fois la même année, le 3 juin à Versailles, à l'occasion d'un pari pour 2.000 F. Sa représentante Méprisée, montée par Flatman, est battue par Mendicant au prince de la Moskowa. Et une semaine plus tard sur le même site, elle doit se contenter de se placer deuxième des trois partants de la quatrième course, un handicap. Les couleurs de Morny (casaque rose, toque rose) ne connurent pas des succès en rapport avec les efforts consentis. Ses chevaux furent entraînés d'abord par Tom Hurst à Lamorlaye puis par Henry Jennings à La-Croix-Saint-Ouen. En premier lieu, il éleva au haras de Lonray puis acquit l'ancien haras de Nicolas-Joseph Rieussec à Viroflay où il installa en 1860 un cheval célèbre, West Australian. Ce héros de la « Triple Couronne » (Deux Mille Guinées, Derby, St Leger) en 1853 et de l'Ascot Gold Cup fut acheté, suite au décès de son propriétaire, pour 4.000 guinées, soit 105.000 F. Après la mort du duc de Morny, à la fin de 1865, le haras de Viroflay fut vendu pour 135.000 F et West Australian acquis pour 31.000 F par l'administration des Haras qui le stationna au Pin. Comme précédemment outre-Manche, la production française de West Australian fut décevante. Sur le turf, le meilleur représentant du duc de Morny, Diamant, eut le malheur en 1856 de franchir la ligne d'arrivée à Chantilly dans le Prix du Jockey Club dans la même foulée que Lion qui le précéda de deux longueurs, une heure après, quand la course donna lieu à une seconde épreuve pour départager les protagonistes. Quant à son élève Ruy Blas, il naquit en 1864, un an avant le décès de son éleveur. Vendu 900 F, il devait remporter à 3 ans quatorze courses dont le Grand Prix de Bade. Les autres chevaux notables du duc de Morny furent Violette, gagnante en 1860 de la Poule des Produits (futur Prix Daru) et 2ème de la Poule d'Essai ; Sauterelle, gagnante du Prix du Gros Chêne en 1862 ; Partisan et Clermont, lauréats du Prix de l'Avenir à Baden respectivement en 1861 et 1864 ; Gédéon, vainqueur en 1864 du Prix de Longchamp (Prix Hocquart) ; et Noélie, 2ème du Prix de Diane en 1862 puis gagnante en 1864 du Grand Prix de l'Empereur (Prix Gladiateur). Le 8 avril 1865, les trente-sept chevaux à l'entraînement du duc de Morny passèrent en vente à Chantilly et réalisèrent 337.950 F.

Le turf français est redevable au duc de Morny de l'hippodrome de Longchamp, du Grand Prix de Paris et des courses à Deauville. Avec une grande clairvoyance, il avait présagé le développement des courses et du tourisme. Longchamp, ouvert en 1857, a été choisi par lui pour donner aux courses parisiennes un cadre digne et fixe en remplacement du terrain épouvantable et intermittent utilisé sur le Champ de Mars depuis 1807. Le montage financier du Grand Prix de Paris (100.000 F au vainqueur) a été conçu par lui afin d'offrir à la capitale un événement sportif et mondain international inédit lors de son lancement en 1863. C'est, en s'inspirant de l'exemple de Baden - la station thermale recevait depuis 1858 l'appui de courses avec l'assistance technique de la Société d'Encouragement - et dans le but de concurrencer la station allemande, qu'il décida de créer Deauville avec son casino et ses courses, à son avis indissociables. Ainsi eut lieu le dimanche 14 août 1864, sur les bords de la Touques, une première réunion de courses. Les couleurs du duc de Morny sont présentes, portées dans la deuxième course par Gentilhomme. Il est battu par la pouliche Fidélité, appartenant à Henri Delamarre. Mais point n'est besoin au duc de recevoir pour qu'il donne. Il offre une cravache à E. Delchet, vainqueur d'une « poule de hacks » réservée aux gentlemen-riders. Pour le duc de Morny, il n'y aura pas de deuxième année de courses à Deauville. Il mourra cinq mois avant.

Parrainage

Depuis 2005, le Prix Morny bénéficie d'un nouveau parrain, Darley, nom attribué par le cheik Mohammed Al Maktoum à ses différents haras. D'où une allocation augmentée de 100 000 €. C'est aussi désormais la finale des #DarleySeries, après les Darley Prix Robert Papin (Gr2) et le Darley Prix de Cabourg (Gr3).

Les pouliches

Sur 150 éditions, les pouliches ont été victorieuses 53 fois. Leur pourcentage de victoires -voisin de 35%-, qui dépasse largement les normes relevées dans les épreuves mixtes, souligne bien la précocité qui est une des caractéristiques des pouliches.

Visiteurs

Ouvert aux chevaux de tout pays en 1875, le Prix Morny perdit cette clause en 1909. Mais durant cette période, aucun cheval étranger ne fut vainqueur. Le protectionnisme ayant pris fin en 1947, aussitôt quelques concurrents britanniques se précipitent à Deauville et l'un d'eux, Delirium, s'empare pour la première fois du Prix Morny. Menace en 1967, avec la visite de Lorenzaccio, déjà 3ème du Prix Robert Papin. Mais Madina le devance sûrement, tout comme un an plus tard une autre pouliche, Princeline, défait la coalition britannique forte de quatre sujets dont les deux premières du Prix Robert Papin, Folle Rousse et Hopiana. En 1970, seconde victoire anglaise, car aucun cheval ne peut s'opposer à l'invincible My Swallow collectionneur de sept courses, deux outre-Manche et cinq en France. On attendra vingt-quatre ans pour enregistrer la troisième victoire d'un visiteur, celle de la pouliche Hoh Magic entraînée à Newmarket par Michael Bell. Mais à sa suite, c'est l'envahissement, un seul Prix Morny demeurant français, celui de 1997 grâce à Chargé d'Affaires. L'occupation est assurée par quatre sujets venus d'Angleterre, Tagula (1995), Bahamian Bounty (1996), Bad As I Wanna Be (2000), Elusive City (2002) et trois arrivés d'Irlande sous la direction d'Aidan O'Brien, Orpen (1998), Fasliyev (1999) et Johannesburg (2001). Mais arrêt de l'invasion en 2003 et 2004 grâce à Whipper et Divine Proportions puis reprise en 2005 avec Silca’s Sister. Seulement deux victoires françaises depuis, celles de Dabirsim en 2011 et de Earthlight en 2019. Trois victoires américaines, celles des pensionnaires de Wesley Ward No Nay Never (2013), Lady Aurelia (2016) et Campanelle (2020) sont aussi à signaler.

Papin et Morny

Le Prix Robert Papin (Gr2, 1 100m jusqu'à 2019, puis 1 200 mètres), toujours disputé en juillet mais à Chantilly et non plus sur la ligne droite de Maisons-Laffitte, et le Darley Prix Morny se déroulant généralement à un mois d'intervalle, il est fréquent que certains chevaux participent à l'arrivée des deux courses. Durant les quelque cent années de vie commune, on compte dix-neuf chevaux ayant réalisé le doublé : Prestige (1905), Necklace (1928), Château Bouscaut (1929), Pearl Cap (1930), Brantôme (1933), Mistress Ford (1935), Nirgal (1945), Auriban (1951), Cordova (1953), Neptune II (1957), Amber Rama (1969), My Swallow (1970), Vitiges (1975), Blushing Groom (1976), Seven Springs (1984), Divine Proportions (2004), Reckless Abandon (2012) et Unfortunately (2017).

Une pépinière de vainqueurs classiques

De nombreux chevaux ayant participé au Prix Morny à 2 ans ont gagné des courses classiques à 3 ans. A titre d'exemple, on relève parmi les vainqueurs: Widgeon (1887) Poule d'Essai, Le Sagittaire (1894) Prix Lupin, Vinicius (1902) Poule d'Essai, Val d'Or (1904) Poule d'Essai, Porte Maillot (1911) Poule d'Essai, Sardanapale (1913) Jockey Club, Grand Prix de Paris, Sourbier (1919) Jockey Club, Fairy Legend (1926) Poule d'Essai, Diane, Château Bouscaut (1929) Jockey Club, Pearl Cap (1930) Poule d'Essai, Diane, Arc de Triomphe, Brantôme (1933) Poule d'Essai, Lupin, Royal Oak, Arc de Triomphe, Mistress Ford (1935) Diane, Esmeralda (1941) Poule d'Essai, Coaraze (1944) Jockey Club, Amour Drake (1948) Poule d'Essai, Auriban (1951) Jockey Club, Chingacgook (1954) Grand Prix de Saint Cloud, Apollonia (1955) Poule d'Essai, Diane, Soleil (1965) Poule d'Essai, Nonoalco (1973) Deux Mille Guinées, Vitiges (1975) Champion Stakes, Blushing Groom (1976) Poule d'Essai, Irish River (1978) Poule d'Essai, Siberian Express (1983) Poule d'Essai, Hector Protector (1991) Poule d'Essai, Zafonic (1992) Deux Mille Guinées, Divine Proportions (2004) Poule d'Essai, Diane. Et parmi les placés ou même non placés on relève Saltarelle, Stockholm, Barberine, Stuart, Arreau, Champaubert, Gouvernant, Flying Star, Banshee, Madrigal, Mary Legend, Rodosto, Bipearl, Mary Tudor, Cillas, Djebel, Caravelle, Ardan, Mistral, Coronation, Sicambre, Midget, Dan Cupid, Kashmir II, Ma Biche, Masarika, River Lady et… Miesque, du superbe monde.

Morny et Jacques Le Marois

Neuf chevaux ont gagné le Prix Jacques Le Marois après avoir remporté à 2 ans le Prix Morny. Ce sont Zariba (1922), Pearl Cap (1931), Sémiramide (1939), Coaraze (1945), Amour Drake (1949), Nonoalco (1974), Irish River (1979), Hector Protector (1991), Whipper (2004).

 

Propriétaires

  • Marcel Boussac (13 victoires): Durzetta (1920), Zariba (1921), Banstar (1925), Cécias (1932), Corrida (1934), Sémiramide (1938), Esméralda (1941), Coaraze (1944), Nirgal (1945), Cadir (1946), Auriban (1951), Cordova (1953), Apollonia (1955).
  • Edmond Blanc (8 victoires) : Marly (1892), Lucie (1899), Farnus (1901), Vinicius (1902), Val d'Or (1904), Mehari (1908), Porte Maillot (1911), Marka (1912).
  • Mme John Magnier (associée, 6 victoires) : Orpen (1998), Fasliyev (1999), Johannesburg (2001), Myboycharlie (2007), Bushranger (2008), No Nay Never (2013).
  • Alphonse de Rothschild (4 victoires) : Louis d'Or (1879), Strelitz (1880), Fresca (1893), Thélème (1903).
  • Famille Niarchos (4 victoires) : Machiavellian (1989), Hector Protector (1990), Coup de Génie (1993), Divine Proportions (2004).


Entraîneurs

  • Robert Denman (8 victoires) : Present Times (1884), Frapotel (1886), Farnus (1901), Vinicius (1902), Val d'Or (1904), Mehari (1908), Porte Maillot (1911), Marka (1912).

  • François Boutin (7 victoires) : Nonoalco (1973), Super Concorde (1977), Tersa (1988), Machiavellian (1989), Hector Protector (1990), Arazi (1991), Coup de Génie (1993).

  • Henry Jennings (5 victoires) : Eole II (1870), Seul (1871), Fusion (1875), Mantille (1877), Favorite (1881).

  • Richard Carver (5 victoires) : Kantar (1927), Ad Astra (1937), Amour Drake (1948), Ksarinor (1949), Pharamond (1959).

  • Charles Semblat (5 victoires) : Coaraze (1944), Nirgal (1945), Cadir (1946), Auriban (1951), Cordova (1953).

  • Alec Head (4 victoires): Sanguine (1950), Chingacgook (1954), Darannour (1962), Princesse Lida (1979).

  • Charles Pratt (3 victoires) : Macaron (1874), Swift (1878), Daphnis (1895).

  • J.-C. Watson (3 victoires) : Fresca (1893), Justitia (1898), Thélème (1903).

  • William Duke (3 victoires) : Prestige (1905), Messidor III (1909), Manfred (1910).

  • Frank Carter (3 victoires) : Necklace (1928), Pearl Cap (1930), Mistress Ford (1935).

  • Etienne Pollet (3 victoires) : Neptune II (1957), Prudent (1961), Grey Dawn (1964).

  • François Mathet (3 victoires) : Solitude (1960), Amber Rama (1969), Blushing Groom (1976).

  • John Fellows (3 victoires) : Ancient Regime (1980), Seven Springs (1984), Regal State (1985).

  • Aidan P. O’Brien (3 victoires) : Orpen (1998), Fasliyev (1999), Johannesburg (2001).

  • Wesley Ward (3 victoires) : No Nay Never (2013), Lady Aurelia (2016), Campanelle (2020).


Jockeys

  • George Stern (10 victoires): Eperon (1900), Farnus (1901), Vinicius (1902), Val d'Or (1904), Mehari (1908), Porte Maillot (1911), Marka (1912), Durzetta (1920), Zariba (1921), Banstar (1925).
  • Edgar Rolfe (6 victoires) : Mantille (1877), Louis d'Or (1879), Strelitz (1880), Directrice (1883), Widgeon (1887), Fontanas (1888).
  • Lanfranco Dettori (6 victoires): Bahaman Bounty (1996), Dabirsim (2011), The Wow Signal (2014), Shalaa (2015), Lady Aurelia (2016), Campanelle (2020).
  • Jacques Doyasbère (5 victoires) : Coaraze (1944), Nirgal (1945), Cadir (1946), Sanguine (1950), Cordova (1953).
  • Gérald Mossé (5 victoires) : Tersa (1988), Arazi (1991), Chargé d’Affaires (1997), Bad As I Wanna Be (2000), Reckless Abandon (2012).